– pour que chante la vie – Éditions Cabédita, Bières 2017, ISBN : 9782882957801 – 72 pages – € 16.– ou CHF 23.–
L’auteur est pasteur, aumônier d’hôpital, violoniste et écrivain. Il a publié plusieurs ouvrages remarqués chez le même éditeur et ailleurs.
Ce petit livre est fascinant : d’abord il est beau, avec de belles photos de violons, et il en émane une atmosphère pleine de poésie. Ensuite il nous permet de découvrir les perfections invisibles de Dieu (Rm 1,20) par la beauté, dans le sens où la définit Lalande : « La beauté correspond à certaines normes d’équilibre, de plastique, de proportions harmoniques, de perfection en son genre… ». Cette beauté qui est dans l’univers, Thierry Lenoir la trouve surtout dans la musique et particulièrement dans le violon.
Sa rencontre avec un luthier lui a ouvert l’esprit à tout un monde fascinant d’harmonie où les nombres, les proportions justes se combinent avec les vibrations et les sons. « La beauté est ce qui donne à la vérité le caractère d’une grâce » (page 26).
Et Thierry Lenoir de nous faire entrer dans les mystères du violon, de la table d’harmonie, des cordes, de l’archet, et surtout de l’ âme du violon, cette fine baguette d’épicéa, à l’intérieur, dans le vide du violon, qui transmet au fond du violon, les vibrations de la table d’harmonie, et donne à l’instrument toute la plénitude de sa sonorité.
Mais, demandera-t-on peut-être, l’auteur ne tombe-t-il pas dans la théologie naturelle en faisant du beau le chemin vers Dieu ? Pas vraiment : la thématique vient plutôt de la littérature sapientiale. Il amène à découvrir le Christ disséminé dans toute sa création. Le Christ était présent à l’esprit des anciens luthiers et les violons, produits de leur art, en sont une représentation symbolique : les cordes traditionnellement confectionnées en boyaux d’agneaux (pas d’un autre animal) étaient tendues sur le violon comme le Christ fut étendu sur la croix. La colophane composée traditionnellement d’or, d’encens et de myrrhe évoque aussi Jésus, de sa naissance à sa mort ; et je ne parle pas du vernis, dont la base était d’une teinture rouge pour rappeler le sang versé à la croix.
Et puis l’auteur, que son ministère d’aumônier met en contact avec l’âme des gens, fait tout un développement allégorique entre le violon, son âme, et celle des humains. Parfois, l’âme du violon peut être déplacée par la pression qu’elle subit ; le luthier doit alors entreprendre de la repositionner ; c’est un travail minutieux et délicat comme une opération chirurgicale. La table d’harmonie peut avoir été fissurée, mais elle ne sera pas remplacée. Ce sont des accidents qui peuvent arriver et font partie de la vie d’un violon, des cicatrices qui en feront une pièce unique. De même la table d’harmonie gardera des traces des artistes qui auront possédé le violon et auront joué dessus.
Le violon, dans sa confection et dans son vécu, est une allégorie de la création et de la vie de chacun de nous, entre les mains du divin luthier-violoniste !
Alain Décoppet