David Dockery – Timothy George, La Grande Tradition intellectuelle chré-tienne

Spread the love

David Dockery – Timothy George, La Grande Tradition intellectuelle chrétienne – Guide d’Étude – [Redécouvrir l’héritage intellectuel chrétien] – Saint-Légier, HET-PRO 2021 – ISBN 978-2-940650-07-1 – 128 pp – CHF 18.- ou € 12.90.

David Dockery (PhD de l’Université du Texas) est actuellement Chancellor de la Trinity International University à Deerfield, Illinois ; Timothy George (PhD de Harvard) est le doyen fondateur de la Beeson Divinité School de l’Université Samford où il enseigne la théologie et l’histoire de l’Église.

Cet ouvrage inaugure une collection dont le but est d’aider les chrétiens, particulièrement les étudiants, à prendre conscience de l’héritage intellectuel de l’Église, afin de l’intégrer à leur vie de foi et à leur piété personnelle.

Les auteurs partent du fait que le texte biblique, qui nécessite une interprétation, a été la source de la tradition intellectuelle chrétienne ; c’est en effet l’habitude d’interpréter la Bible qui a généré celle de commenter d’autres textes littéraires. Les auteurs passent en revue les lieux où des chrétiens ont apporté leur pierre à l’édifice de la réflexion, comme l’École d’Alexandrie de Clément ou Origène, les université du Moyen âge (Thomas d’Aquin) celles de la Renaissance avec Érasme, Luther et surtout Calvin, qui est placé « au-dessus de tous » (p. 46), car à la fois excellent interprète des Écritures et penseur puissant, capable d’influencer durablement ses contemporains. Le siècle des lumières, avec ses conséquences, a suscité, par réaction, des penseurs chrétiens, comme Warfield, Kuyper, Karl Barth ou Newman, etc. qui ont su relever le défi d’exprimer leur foi face à de nouvelles conceptions d’où Dieu est exclu.

Les chapitres 2-3 m’ont paru particulièrement intéressamts : ils traitent de l’élaboration de la tradition intellectuelle chrétienne. Les auteurs soutiennent l’idée qu’il y a dans le NT un dépôt apostolique, un noyau central, ADN du christianisme, qui, si on le rejette, prive l’Église de sa Vie. Le combat contre l’hérésie a permis de mieux le cerner : ainsi, la lutte contre Marcion qui voulait gommer les racines juives du christianisme, a permis de mettre en valeur la continuité entre l’AT et le NT, donc entre création et rédemption (pp. 57-59). À cause d’Arius on a dû élaborer le dogme de la trinité et, à terme, celui de la double nature du Christ (pp 59-61). Pélage a obligé à définir la problématique du péché originel, de la prédestination, du libre arbitre (l’homme peut-il se sauver sans la grâce, en a-t-il le pouvoir ? – pp 61-64). La réponse à ces trois hérésies forme un socle important pour la tradition intellectuelle chrétienne, impliquant le respect du créé (Marcion) ; la présence du divin dans l’humain (Arius – Jn 1.14, sans confusion de l’un avec l’autre), la nécessité de faire une place à la grâce (Pélage), sans tout exiger du vouloir humain – par ex. dans l’éducation, la nomination d’un collaborateur etc. (pp 64-68).

Au chapitre 4, les auteurs partent de la “foi transmise aux saints une fois pour toutes” (Jude 3). La foi c’est le contenu essentiel de ce qui est à croire, mais c’est aussi la confiance en Dieu ; elle se manifeste par des actes, comme Luther et les protestants qui ont protesté (témoigné) de leur foi à la Diète de Spire ou comme Karl Barth et l’Église confessante à Barmen en 1934 (pp 69-83).

Au cours des siècles les chrétiens ont renouvelé l’enseignement en y apportant une perspective d’En-haut. Dans certains domaines cet apport sera moins marqué que dans d’autres (p.ex. les sciences dures).

Le livre se termine par des questions faisant réfléchir sur le sujet, un tableau chronologique et un glossaire.

Pour conclure, une remarque personnelle sous forme de question : s’il me semble capital que des chrétiens œuvrent dans la vie universitaire, est-il justifié de créer des universités chrétiennes – mis à part pour le domaine spécifique de la théologie chrétienne ? Des hommes comme Jean Brun, René Girard, Pierre Chaunu, Jacques Ellul, Jean-Claude Guillebaud, etc. n’ont-ils pas exercé dans des universités laïques ? … et pourtant…

Alain Décoppet

Les commentaires sont clôturés.