Roland Meynet, Le psautier , Cinquième livre (Ps 107-150), Louvain, Éditions Peeters 2017 – ISBN: 978-90-429-3510-5 – 747 p. – € 72,–.
Roland Meynet, Le psautier , Premier livre (Ps 1-41), Louvain, Éditions Peeters 2018, ISBN: 978-90-429-3760-4 – 637 p. – € 75,–.
Les habitués de ces recensions savent combien j’apprécie les ouvrages de Roland Meynet. Aujourd’hui professeur émérite de théologie biblique (Université Grégorienne – Rome), il est connu pour avoir mis au point ce qu’on appelle la « Rhétorique biblique et sémitique ». Arabisant et hébraïsant, ayant vécu près de 30 ans au Liban et en Israël, théologien, titulaire en outre d’un doctorat en linguistique, Roland Meynet a pu, juché sur les épaules de divers devanciers, mettre au point cette méthode qui permet d’appréhender le texte biblique d’une manière appropriée, c’est-à-dire comme une composition réalisée par des sémites et non selon les règles de la rhétorique gréco-romaine. Cette méthode s’applique également avec succès aux textes sémites du Moyen Orient ancien, antérieurs à la Bible, comme à ceux, ultérieurs, du Coran et de la tradition islamique. Après, entre autres, des commentaires sur le livre d’Amos, sur les Évangiles de Luc (couronné du prix de philosophie de l’Académie française, 2006) et de Marc, sur l’Épître aux Galates, Roland Meynet vient de publier coup sur coup un commentaire sur le cinquième, puis le premier livre des Psaumes – et le commentaire du troisième livre (Psaumes 73-89) est annoncé pour 2019.
Ce genre de commentaire tient compte bien sûr des recherches historiques, philologiques et autres nécessaires à une bonne exégèse, mais ce n’est pas là l’essentiel de son domaine d’investigation. Il prend le texte biblique tel qu’il est, et son apport spécifique est de mettre en valeur la manière dont il est composé, afin d’en dégager le sens. Ce sens est analysé à plusieurs niveaux successifs, en partant de la plus petite unité, le segment, jusqu’au livre complet et à la Bible (par des liens intertextuels), en passant par le morceau, la partie, etc. Cela donne une impressionnante richesse d’interprétations. C’est un peu comme une vallée dont on aurait parcouru le fond et qu’on découvrirait de plus en plus dans sa globalité en s’élevant le long de sa pente.
Chaque psaume est donc analysé dans le détail, mais ensuite une série de psaumes sont analysés pour faire apparaître leur structure d’ensemble ; cela se fait de plus en plus depuis quelques décennies. Mais ici, on a l’art consommé de l’auteur qui a largement présenté sa méthode. Enfin, l’ensemble du livre, respectivement le cinquième et le premier sont analysés dans leur ensemble.
La composition du cinquième livre (Ps 107-150) se révèle extrêmement élaborée. Au centre de la construction, le Ps 119, qui est une longue méditation sur la Loi. Il est précédé par « le Hallel égyptien » qui célèbre l’exode du pays de l’esclavage (Ps 113-118) et suivi par « les Psaumes des montées » qui chantent et espèrent le retour de l’exil à Babylone (Ps 120-134). Aux extrémités enfin, deux sous-sections qui se correspondent : selon les mots même du psalmiste, « De la bouche d’imposture à l’action de grâce du juste » (Ps 107-112), « Du venin du serpent à la louange des justes » (Ps 135-145). Les Ps 146-150 forment une louange qui conclut le psautier.
Le premier livre a une structure élaborée avec tout autant de soin : sa première section (Ps 1–18) est toute entière occupée par la menace que font peser sur le psalmiste ses ennemis, tandis que les deux sections suivantes (19–25 et 26–41) opèrent le passage de l’ancienne alliance à la nouvelle.
Je n’ai pas encore lu entièrement ces deux gros « pavés », mais ayant dû préparer une contribution sur le « Hallel Égyptien », j’ai pu déjà en apprécier toute la force et la richesse. De quoi ne pas regretter le prix élevé à débourser pour les acquérir.
Alain Décoppet
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