René Jacob, L’Évangile de Marc – l’Évangile de la foi – Paris 2020, Éd. de L’Harmattan –ISBN : 978-2-343-19407-3 – 530 pages –€ 42,–.
René Jacob est prêtre du diocèse d’Arras. Il est titulaire d’une licence d’enseignement en lettres classiques. Il est également licencié en Écriture Sainte de l’Institut Biblique Pontifical de Rome et diplômé de l’École Biblique et Archéologique de Jérusalem. Il a enseigné au Grand Séminaire de Lille, à l’Institut Pastoral et à la Faculté de Théologie de Lille.
Ce gros volume est un commentaire suivi de tout le deuxième Évangile. Il est précédé d’une introduction qui ne se perd pas dans des spéculations sur l’auteur ou la date de rédaction, mais suit la tradition de l’Église. Quant à la méthode utilisée, René Jacob, opte une pour une approche synchronique qui lui permet de mettre en valeur une construction très cohérente de l’Évangile de Marc. Dans la foulée de Pierre Mourlon Beernaert, il a découvert l’importance du chiasme dans la composition des textes d’origine sémitique.
Ses recherches l’ont amené à découper l’Évangile en 21 sections, toutes concentriques ; elles sont réparties en deux ensembles de dix (7 + 3) sections chacun ; le chapitre 16, avec le récit du tombeau vide, forme une 21e section, également concentrique. Les 7 premières sections du premier ensemble (1,1 à 6,29) se centrent sur l’identité de Jésus, et les 3 dernières (6,30 à 8,26) marquent l’abolition du pur et de l’impur. Pour le deuxième ensemble, les 7 premières sections (8,27 à 13,37) parlent de l’identité des disciples et les trois dernières sections (14,1 à 15,39) racontent la passion de Jésus.
J’ai trouvé ce commentaire intéressant : l’auteur a un réel souci d’apporter quelque chose de nouveau dans l’interprétation de l’Évangile de Marc, de le faire comprendre et d’édifier ainsi l’Église. Il donne en fin de chaque section des résumés pour bien montrer comment la structure est significative.
Cependant, je qualifierais de réductrice l’option de René Jacob de vouloir trouver partout des structures concentriques ; cela l’amène à une rigidité discutable : ainsi, dans la première partie, par exemple, il est obligé (p. 47) de ne pas compter le récit du baptême de Jésus pour que sa structure puisse jouer. Dans son commentaire du chapitre 4, et bien qu’il s’en justifie d’une manière intéressante, René Jacob ne m’a pas convaincu quand il rattache la parabole du semeur (Mc 4,1-9) à ce qui précède et doit par conséquent la détacher de son explication et la séquence des autres paraboles. Vouloir tout réduire au chiasme ne me paraît pas rendre complètement justice à la manière dont fonctionne la pensée sémitique. Celle-ci, comme j’ai tenté de le montrer dans mon article « Le midrash, une source de la rhétorique biblique »((Hokhma No 101/2012, pp 31-66.)), est fondamentalement binaire : elle procède en mettant en regard deux propositions dont elle cherche le rapport de ressemblance ou de différence, comme on trouve la solution d’une énigme. À la base donc, pour poser le problème, deux propositions en regard suffisent – si l’énigme est posée sous forme concentrique (cela existe, certes), l’auteur donne au centre un élément qui oriente vers la solution de l’énigme. Il y a donc plusieurs structures pour présenter une énigme : parallèle (ABC-A’B’C’), concentrique (AB C B’A’), spéculaire (AB-B’A’), et la liste n’est pas épuisée.
Cette réserve étant faite, relevons le travail de valeur de ce commentaire qui s’adresse à un public connaissant le grec biblique (généralement traduit). Les schémas permettant de voir la structure d’ensemble peuvent être consultés sur : http://www.evangiledemarc.online/
Alain Décoppet
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