Shafique Keshavjee, L’Islam conquérant

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Shafique Keshavjee, L’Islam conquérant – textes, histoire, stratégies, édition IQRI 2019, © chez l’auteur 2018 – ISBN 978-2-8260-1120-0 – 232 pages –CHF 19,–.

Shafique Keshavjee, après des études en sciences sociale et politique et en théologie, a obtenu Kesh_Islamun doctorat en Science des religions. Il est pasteur de l’Église Évangélique Réformée du Canton de Vaud et a été professeur à la Faculté de théologie de Genève. Il est connu du grand public pour divers ouvrages comme « Le roi, le sage et le bouffon » et récemment, « Pour que plus rien ne nous sépare », dont Hokhma a fait la recension.

Dans ce nouveau livre, qui sans doute devrait faire date, il écrit : « Une des tâches les plus urgentes de notre temps est de mettre en lumière les dimensions normatives et effectives de l’Islam. Avec ses beautés et ses violences » (p. 65). Et c’est à cela qu’il s’attelle, avec compétence.

Pour présenter sa thèse, l’auteur constate que dans l’histoire, l’homme a toujours voulu dominer son semblable. Mais certaines idéologies ou religions se sont établies en « Système suprême », un concept qu’il a élaboré pour définir les systèmes qui visent à s’imposer au monde entier. Le Christianisme, l’Islam, le Marxisme, le Capitalisme, le Relativisme, etc. se sont érigés en systèmes suprêmes. Pour évaluer l’un de ces systèmes, il propose de l’examiner sous trois aspects différents :

  1. Normatif – les textes, les enseignements qui fondent le système. Pour les Chrétiens, ce sont la Bible, les confessions de foi, les décisions des Conciles, etc ; pour l’Islam : le Coran, les Hadith (paroles du prophète transmises par la tradition orale) et la Sirah (vie de Mahomet) ;

  2. Effectif – ce qu’a été et est le système dans la réalité, hier et aujourd’hui ;

  3. Interprétatif – que dit-il de lui-même, que prétend-il être. Cette présentation discursive peut varier en fonction de l’interprétation qu’en donne celui qui parle, du but qu’il cherche à atteindre et du public visé.

Si ces trois aspects (normatif, effectif et interprétatif) sont à distinguer, on ne saurait les séparer. Il est utile de comparer deux systèmes, en mettant ces trois aspects en regard.

A cette lumière, Shafique Keshavjee commence par balayer devant sa porte de chrétien en montrant que le Christianisme, souvent allié au Capitalisme, s’est conduit de façon répétée d’une manière contraire à l’enseignement de Jésus. Il est donc tout à fait conscient de la poutre qui est dans notre œil, avant de vouloir enlever la paille du voisin.

Pour expliquer l’Islam, il considère trois dimensions qui peuvent sur superposer sur trois niveaux :

  1. une dimension spirituelle communautaire,

  2. une dimension sociale, avec un projet politique,

  3. une stratégie militaire.

En s’inspirant d’Henri Boulad qui a écrit la préface du livre, S. Keshavjee classe les musulmans en six catégories qui ne sont pas étanches les unes aux autres :

  1. laïque libérale – ne retenant que l’aspect cultuel et adoptant les valeurs démocratiques occidentales ;

  2. mystique (soufis – généralement paisible, mais qui peut compter des individus avec un projet politique) ;

  3. populaire – mêlée d’éléments religieux préislamiques, comme en Afrique ;

  4. étatique officielle – comme dans les pays donnant la prééminence à l’Islam ;

  5. radicale – islamisant par infiltration (Frères musulmans) ;

  6. radicale révolutionnaire – islamisant par la force (Al-Quïda, Daesh).

Les musulmans qui soutiennent le projet politique de l’Islam et a fortiori sa stratégie militaire en font par là une religion conquérante.

Aujourd’hui, beaucoup de spécialistes essaient de dire que l’Islam est fondamentalement une religion de paix et qu’il ne faut pas tenir compte des agissements particuliers qui n’ont rien à voir avec l’Islam. Ces allégations ne tiennent compte ni de ses fondements ni des faits de la réalité. C’est ce que démontre S. Keshavjee, dans la deuxième partie (pp 67ss) intitulée : “L’islam conquérant comme système suprême”.

La majorité des Musulmans vivent paisiblement leur religion sans la considérer comme un système suprême : souvent ils connaissent mal les sources de leur religion. Ils gardent l’image d’une religion qui a permis le développement d’une brillante civilisation et a beaucoup apporté au monde (souvent d’ailleurs en récupérant par les chrétiens syriaques les connaissances accumulées antérieurement). Mais pour ceux qui connaissent les fondements et veulent les mettre en pratique, l’Islam est un système suprême dont il résume le programme en quinze directives. Il n’est pas question de les énumérer ici, mais retenons que l’Islam est un système à sens unique où il est facile d’entrer, mais presqu’impossible de sortir (peine de mort pour les apostats – pas de liberté). Il vise la conquête du monde, avec persévérance : lorsqu’il est faible, il avance masqué, tâchant de convaincre, usant de la carotte ou du bâton suivant les circonstances, anesthésiant ses adversaires, attendant le moment favorable pour agir. Mais dès qu’il en a les moyens, il s’impose par la force.

La force du livre de Shafique Keshavjee et d’avoir été chercher non seulement dans le Coran – ce que déjà peu de Chrétiens on fait – mais encore dans les Hadith et la Sirah (la vie de Mahamet) – que quasiment personne n’a lus – ce que dit l’Islam dans ses sources. Il donne une moisson de citations très significatives et arrive à la conclusion : l’Islam est le seul système suprême religieux qui a reçu mission de conquérir le monde par la force. Et ce n’est pas que du passé, car les déclarations (citées aux pp 111-112) de Khomeiny comme celles de Al-Banna, le fondateur des Frères musulmans et grand-père de Tariq Ramadan vont dans le même sens. On doit tenir compte du fait que l’Islam n’est pas une simple religion spirituelle, mais qu’elle a un projet politique et une stratégie militaire ! Lorsque des musulmans demandent à prendre leur place dans nos sociétés occidentales, il faut leur demander de se situer clairement face à la violence prescrite dans leurs textes normatifs qui se présentent comme Parole de Dieu ! Cet état de fait pose un réel problème, car il est de bon ton de présenter l’Islam comme une religion de paix. Que faire quand on s’aperçoit qu’elle est une religion de guerre ?

Un glossaire et une bonne bibliographie complètent l’étude.

Il faut être reconnaissant à Shafique Keshavjee d’avoir eu le courage de publier un livre que certains vont peut-être qualifier d’islamophobe. Je connais l’auteur depuis le temps de nos études à Lausanne et puis témoigner de son amour et de son respect pour les personnes et de sa capacité à voir la beauté des choses ; mais je connais aussi son amour de la vérité qui libère et son aversion pour l’injustice. Je vois derrière « L’Islam conquérant » le même esprit qui le faisait dénoncer les injustices de la mondialisation dans « La princesse et le prophète ». Prions pour que ce livre soit pris au sérieux avant qu’il ne soit trop tard !

Alain Décoppet

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